Capitale: Monrovia
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Suivant l'exemple Britannique de Freetown, la "American Colonization Society" a établi la colonie de Monrovia en 1824 pour rapatrier des esclaves d'Amérique libérés et a nommé le territoire environnant Libéria. En 1848 le Libéria est devenu un pays indépendant avec une constitution semblable à celle des USA. Les frontières ont été fixées par des traités avec les Britanniques et les Français en 1892 et 1911, mais le gouvernement n'a eu un contrôle effectif du territoire qu'en 1940. Dès le début, le pouvoir a été dans les mains d'une prospère élite Américano-libérienne bien organisée autour du parti "True Whig" et de l'ordre des francs-maçons. Cette élite est rapidement devenue corrompue et s'est enrichie de l'exploitation du caoutchouc, du minerai de fer et des revenus tirés de l'enregistrement de bateaux étrangers pendant que les tribus indigènes, qui comprenaient 95 pour cent de la population, avaient peu à dire dans l'administration du pays et encore moins dans le partage de ses richesses. En 1980 un sous-officier indigène du nom de Sam Doe a réussi un coup d'état, tué le président et publiquement exécuté 13 de ses ministres du parti True Whig. La dictature militaire qui a suivi a été encore plus corrompue et plus brutale que le régime des Américano-libériens. Le pouvoir était maintenant entièrement entre les mains de la petite tribu Krahn de Doe qui ne représentait que seulement 2% de la population. Toute opposition était brutalement réprimée et à la fin de la décennie, la sauvagerie de Doe était comparée à celle de l'Ougandais Idi Amin Dada. Vers la fin de 1989, plusieurs centaines de membres des tribus Gio et Mano qui avaient été maltraitées par Doe, se révoltés dans le nord-est sous la conduite de Charles Taylor qui avait été accusé de détournement par Doe pendant qu'ils travaillaient ensemble. La tribu Gio a très vite formé ses propres forces rebelles sous la conduite de Prince Johnson et une sanglante guerre civile à trois fronts a commencé. Il a fallu sept ans de guerre inter-tribale et de cessez-le-feu systématiquement rompus pour que les efforts combinés des pays Africains voisins et de l'ONU arrivent à imposer un répit et à organiser des élections qui ont été gagnées en juillet 1997 par Charles Taylor avec 75% des voix. Le Libéria avait de nouveau une forme démocratique de gouvernement après presque vingt ans de dictature et de guerre civile, mais il était maintenant physiquement ravagé et économiquement ruiné avec une dette extérieure de 2 milliards de dollars et aucune assurance réelle que les intérêts de chefs corrompus ne prendraient pas à nouveau le dessus sur ceux du pays et de son peuple. |
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Le bâtiment à gauche est l'Hôtel Florida où j'ai payé 10 dollars pour une minable chambre sans électricité ni eau courante.
Les combats dans Monrovia et ses alentours se sont arrêtés il y a plus de deux ans mais la ville était toujours en ruines. Les lignes à haute tension en cuivre qui l'alimentaient n'ont pas été remplacées et il y avait très peu de combustible pour faire fonctionner les rares groupes électrogènes .
Il y avait une atmosphère de forte tension autour de groupes de jeunes chômeurs désœuvrés. J'ai pris très peu de photos, et les ai faites très subrepticement car on m'avait parlé de raclées sévères subies par des expatriés d'ONG qui en avaient pris ouvertement. C'est pourquoi elles sont si mal cadrées.
Cette image, prise du balcon de l'hôtel, montre Front Street dans le centre ville, avec des vendeurs de rue traînant des bidons d'eau de 50 litres dans des brouettes.
La reconstruction de Monrovia et de l'économie du pays coûtera des sommes énormes que personne n'est pressé d'investir dans un pays qui montre peu de perspectives de stabilité durable.
Il est difficile d'imaginer le potentiel de violence qui se cache derrière cette vue paisible du Fleuve Mesurado que j'ai prise de la fenêtre de mon hôtel.
Il y a actuellement une forme démocratique de gouvernement mais il n'y a aucune communauté réelle d'intérêt entre les deux douzaines de tribus qui vivent dans le pays. Au contraire, la tradition politique du Libéria, comme dans beaucoup d'autres pays Africains, est celle d'une l'oppression de la majorité par une minorité corrompue qui s'accroche au pouvoir par tous les moyens possibles jusqu'à ce qu'elle en soit violemment expulsée.
La démocratie veut dire peu de choses pour le libérien moyen qui ne sait pas ce que c'est réellement (à part le fait d'avoir à voter de temps en temps). Soixante-deux pour cent de la population est analphabète et seulement un quart des enfants d'âge scolaire vont à l'école. La solidarité familiale et tribale est de loin plus importante que les notions abstraites sur la façon dont la gestion des fonds publics par les politiciens et les fonctionnaires devrait être rigoureusement distincte de celle de leurs ressources personnelles. Au meilleur de leurs connaissances, la corruption est la norme car c'est tout ce qu'ils ont vu depuis des générations. La plupart acceptent que c'est une prérogative de tout fonctionnaire de demander des pots-de-vin à tous les niveaux du gouvernement.
Une carrière politique peut-être une affaire très attrayante quand la corruption est si largement acceptée et pratiquée. Dans beaucoup de pays c'est la seule place où on peut s'enrichir réellement. En Afrique, la politique est la table de poker qui offre les meilleures chances de gain et les enjeux les plus élevées.
Avec de tels enjeux, il n'est pas étonnant qu'elle attire tous genres d'aventuriers et de desperados qui ne seraient jamais tentés de faire de la politique dans les pays où il y a moins à gagner sans risque car la corruption y est mieux contrôlée.
A mon avis, le Libéria est un exemple classique du mécanisme par lequel la corruption engendre la dictature, la révolution et la guerre civile. L'histoire se répète encore et encore. On a vu le même processus en marche, non seulement en Afrique, mais aussi dans beaucoup d'autres endroits notamment en Amérique du Sud.
A mon avis, la Russie et l'Asie Centrale sont maintenant dans la phase dictatoriale du cycle. Nous pouvons tous frissonner à l'idée de ce que seront la révolution et la guerre civile qui risquent fort de compléter le cycle. Nous sommes tous concernés, car la corruption empêche la mise en place de règles du jeu équitables pour la conduite l'économie globale. Il est dans l'intérêt de chacun de nous de faire quelque chose pour combattre la corruption internationale.
Sur un plan moins sérieux, cette photo montre qu'il est toujours possible de prendre un peu de bon temps avec des amis et un verre de bière, même dans un pays déchiré par la guerre comme le Libéria. Ces courageux hommes d'affaires libanais nés en Afrique, étaient réticents à parler de l'épreuve qu'ils avaient traversée, mais ils n'avaient pas perdu leur amour de la vie ni leur sens de l'humour. A l'arrière, Louis Haddad, le propriétaire de l'hôtel et son amie Marta Cisco, à l'avant, de gauche à droite, Jacques Khalef, votre serviteur et Alex Karout.