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La nouvelle partie d'échecs de Bush


Le fond de cette page est en gris pour la distinguer des autres car son contenu est purement spéculatif. Il est aussi gris car la situation actuelle n'a rien de rose!

Depuis le 11 septembre, j'ai souvent eu l'impression d'assister à une partie d'échecs quand j'écoute les nouvelles au sujet de la nouvelle guerre de l'Amérique. Nous savons tous que les média manipulent l'opinion publique, pas seulement à travers la publicité mais aussi par le parti pris avec lequel ils choisissent le contenu des nouvelles et la façon de les présenter. Le cas de la Chine est un exemple évident, nous n'en entendons jamais parler sauf s'il y a un événement terriblement négatif à rapporter. Depuis le 11 septembre, la manipulation des média est devenue tellement lourde qu'il faudrait être aveugle pour ne pas voir la succession de gestes destinés à produire le consentement du public américain pour les actions que les élites corporatives ont décidé d'entreprendre.

La rigoureuse absence de la question "POURQUOI" apparaît comme un mouvement stratégique aussi important que ceux de la "satanisation" systématique des scélérats d’Al Qaeda et de la glorification des héros américains des premier secours. Ce furent des mouvements réussis, ils ont effacé l’image du politicien inepte d'un Bush qui avait volé l’élection et l'ont revêtu de la scintillante armure de Saint-Georges combattant le dragon.

Ensuite vint la tentative de dissocier le mouvement terroriste d’Al Qaeda du conflit Israélo-Palestinien. Cela n'a pas réussi, les gens n'ont pas été trompés par l’explication voulant que la haine de Bin Laden soit due seulement à la présence américaine en Arabie Saoudite. En dépit de toute l’habilité professionnelle des experts manipulateurs d’opinion de Bush, tout le monde a plus ou moins clairement réalisé que les racines du terrorisme islamique se trouvaient dans le terrorisme sioniste qui a obligé les Britanniques à se défaire de la Palestine comme d'une patate chaude, qui a chassé les réfugiés arabes de leurs foyers durant la guerre de 1948 et qui opprime les habitants des territoires occupés depuis la guerre de 1967. Ce jeu n’a pas réussi mais ce fut seulement un échec partiel parce que la ferveur patriotique et la pression médiatique ont empêché les citoyens américains qui s'en étaient rendu compte, de dire tout haut que la politique étrangère au Moyen Orient était la raison pour laquelle le World Trade Center de New-York avait été frappé plutôt que la Tour Eiffel, le Kremlin ou le Palais de Buckingham.

Et puis, à partir d’octobre 2001, Richard Butler, l’ancien inspecteur-chef des Nations Unies et d'autres partisans de la guerre, ont commencé à faire des apparitions régulières à la télévision CNN pour semer la thèse que Saddam Hussein était une menace majeure pour l’Amérique parce qu’il avait l'intention de développer des "armes de destruction massive". Naturellement, aucune mention ne fut faite de toutes les autres nations qui possèdent déjà des "armes de destruction massive". Pas plus qu'il ne fut mentionné que Saddam serait dissuadé d’utiliser de telles armes par l'assurance qu’Israël et l’Amérique n’hésiteraient pas à user de représailles avec des armes nucléaires s’il le faisait. Personnellement, je pense que la menace des "armes de destruction massive" de l’Irak n'est qu'un prétexte. La dissuasion nucléaire a bien fonctionné durant la guerre froide, elle fonctionne maintenant entre l’Inde et le Pakistan et il n'y a pas de raison pour qu'elle ne fonctionne pas pour empêcher Saddam Hussein d’utiliser de telles armes s’il réussissait à les obtenir.

La campagne pour "sataniser" Saddam Hussein a été implacable depuis le 11 septembre. Il y a anguille sous roche derrière cette campagne. Personnellement, je pense qu'il s'agit probablement d'une toute petite partie d'une plus vaste stratégie dans laquelle c'est le pétrole de l’Irak qui est en jeu et non pas ses armes. C'est quand même remarquable qu'on ne mentionne jamais les immenses réserves pétrolières de l'Irak! Les manipulateurs d’opinion professionnels de Bush doivent avoir une bien piètre opinion de l'intelligence de l'Américain moyen pour penser qu'il suffit d'éviter de mentionner les réserves pétrolières de l'Irak pour amener les Américains à croire que la guerre tant souhaitée ne concerne que l'intention de Saddam Hussein de se doter d'"armes de destruction massive"! Il se peut que leur évaluation soit juste! De toutes façons ils sont maintenant ardemment à l'oeuvre pour conditionner l’opinion publique américaine pour qu'elle soit en faveur d’une attaque "préemptive" en Irak pendant que le président Bush se permet le luxe de déclarations modérées à propos de sa patience infinie et de son souhait de trouver des moyens alternatifs pour obtenir un changement de gouvernement à Bagdad

Il s'agit en effet d'une fascinante partie d’échecs. Les trois déplacements de pièces évoqués ci-devant ne sont que des exemples pour illustrer comment la partie est d'abord jouée sur le terrain du modelage de l’opinion publique avant de la déplacer sur le champ de bataille. Appeler ça la partie d'échecs de Bush n'est une simplification commode car en fait c’est la partie d'échecs des éléments bellicistes du complexe militaro-industriel américain, qui souhaite retirer le maximum de la présente supériorité militaire écrasante de l’Amérique pendant qu’elle dure. La recette de la manipulation des foules est simple:

a) réduire la capacité de pensée critique des gens par la promotion de toutes sortes de croyances irrationnelles, qu'elles soient religieuses, du nouvel âge ou paranormales parce que cela aide à désactiver la pensée rationnelle et le jugement individuel bien équilibré,

b) insister systématiquement sur les aspects émotionnels plutôt que factuels de l'actualité car cela conditionne les gens à se soumettre à leurs sentiments plutôt qu'à chercher à guider leur comportement par la raison,

c) lorsque les deux premières étapes ont été réalisées correctement, il est facile d'intimider les "masses" pour qu'elles se conforment à une pensée politiquement correcte en idéalisant le "patriotisme" et en satanisant la dissidence. Quelques exemples d'individus qui perdent leur emploi à cause de leurs opinions "non patriotiques" peuvent être très convaincants et l'application d'un peu de force fait le reste. Le Secrétaire d'État à la Justice Ashcroft a déjà donné l'exemple de cette force en arrêtant entre 1500 et 2000 individus détenus incommunicado sans même dévoiler leurs noms. Le fait qu'il n'y ait pas eu un tollé général est une mesure de l'avancement que ce conditionnement a déjà atteint. Cette contravention à la règle fondamentale d'"habeas corpus", quelles que soient les circonstances, est un premier pas vers la perte des droits constitutionnels, principale caractéristique des états totalitaires.

d) finalement, quand la majorité a été bien conditionnée de cette façon, les mécanismes qui déterminent le comportement des foules sont entre les mains des manipulateurs et tout devient possible. Hitler et Goebbels ont brillamment utilisé cette recette avec le peuple Allemand, pourtant réputé rationnel.

Aucun joueur d’échecs, qui observe une partie intéressante, ne peut s’empêcher de spéculer sur les stratégies qui sous-tendent les mouvements des joueurs. Nous ne sommes pas des stratèges impériaux mais il est difficile d’assister à la manipulation actuelle de l’opinion publique américaine sans spéculer sur la stratégie derrière les mouvements majeurs que prépare sans doute le lavage des cerveaux auquel nous assistons. Mais naturellement, la spéculation n'est que de la spéculation et c’est pourquoi cette page est en gris. Je conçois cette page comme un exercice continu sujet à être corrigé et complété au fur et à mesure que progresse la partie d’échecs de Bush. Le contrôle de l’opinion publique américaine par les média est tellement fort que le scénario suivant pourrait bien se déployer sans que l’américain moyen ne doute un seul instant de la vertu de Blanche Neige de son gouvernement et de la noirceur diabolique de toute forme d’opposition. Le gouvernement américain a réussi ce tour de force en Amérique Centrale alors pourquoi pas au Moyen Orient où les enjeux sont tellement plus élevés ?

1) Bush entraîne le monde occidental dans une guerre contre l’Irak. Les média ont largement réussi à semer la peur des hypothétiques "armes de destruction massive" de l’Irak dans le public américain. Une faible majorité des Américains est maintenant en faveur d'une attaque "préemptive" et ceux qui ne le sont pas n’osent pas faire état de leur opposition à cause du climat de peur qui règne aux États-Unis depuis que la "Loi des Patriotes" a mis de côté les droits constitutionnels de ceux que le gouvernement déclare être des "ennemis". (C’est un retour en arrière à l’emprisonnement des Américano-Japonais durant la seconde guerre mondiale ou à la chasse aux sorcières de Mac Carthy peu après).

2) Une guerre en Irak provoquerait probablement un soulèvement anti-américain en Arabie Saoudite où la famille royale corrompue a perdu la confiance de la population fondamentaliste Sunni à cause de ses relations étroites avec l’Amérique qui finance et supporte l’occupation de la Palestine par Israël. Si ce résultat probable se produit, les forces américaines devront occuper les champs de pétrole pour les protéger contre une population hostile. Ce ne serait vraiment pas un problème étant donné l’accablant déséquilibre de pouvoir en faveur des États-Unis (l’Arabie Saoudite ne compte que 20 millions d’habitants). La partition du pays en un tiers nord-est près du golfe Persique où se trouve le pétrole et les deux tiers restants avec la Mecque sur la Mer Rouge, pourrait être une étape vers une solution à long terme. Les média ont déjà commencé à exciter l’opinion publique américaine contre l’Arabie Saoudite en répétant sans cesse que Bin Aden et la plupart des dix-neuf pirates de l'air étaient saoudiens, que l’argent saoudien avait aidé à construire des madrasas (écoles islamiques) un peu partout dans le monde et que les organismes de charité saoudiennes aident les familles des kamikazes palestiniens à reconstruire leurs maisons lorsqu'elles sont détruites par les bulldozers israéliens.

3) Il n’y a aucun doute que les États-Unis puissent gagner la guerre en Irak en quelques semaines même sans aucun allié. Saddam serait tué et la puissance militaire de l’Irak serait détruite mais les forces américaines seraient obligées de rester de peur que l’Iran ne remplisse le vide. Plusieurs scénarios d'un contrôle américain permanent peuvent être envisagés incluant la partition du Nord kurde et du Sud chiite pour y établir de dociles états pantins "démocratiques" laissant un centre Sunni occupé militairement autour de Bagdad.

4) Quant à l’Iran, la juxtaposition du régime théocratique des mollahs et celui des forces américaines soutenant un ou plusieurs régimes pantins en Irak et en Arabie Saoudite serait de toute vraisemblance instable. Le contrôle de L’Iran est encore fermement détenu par les mollahs mais la population trouve leur pouvoir corrompu de plus en plus lourd. La génération plus âgée se souvient que l’économie se portait bien mieux sous le régime du Shah et que sa police Savak n’était pas pire que la police secrète d’aujourd’hui. Les États-Unis seraient bien placés pour promouvoir une opposition au régime actuel ce qui pourrait éventuellement conduire l’Iran à devenir un état client des EU. Cette prise de contrôle serait préférablement réalisée par une subversion graduelle parce que l’Iran compte une vaste population de 66 millions mais elle pourrait aussi être accomplie brutalement si une forte réaction des mollahs fournissait aux États-Unis le prétexte de la menace du fondamentalisme islamique pour justifier une intervention armée.

Naturellement, d’innombrables permutations sont possibles comme dans toute partie d’échecs. Ce sera une partie intéressante à surveiller tout en essayant d'en prédire l'évolution par l'analyse de la façon dont les média américains vont manipuler leur public. Les média américains ne rapportent qu'une petite partie des faits et, si leur comportement bien documenté dans le cas de l'Amérique Centrale est gage d'avenir, on peut s'attendre à ce qu'ils les rapportent de façon à justifier la prochaine agression américaine. ¨Ça nous permettra de voir venir les coups!

C'est curieux toutefois qu'ils ne mentionnent jamais le rôle du pétrole dans cette partie d’échecs! Les États Unis consomment 30% de la production mondiale de pétrole mais ils ne détiennent que 5% des réserves mondiales de cette forme d'énergie et doivent importer 60% de leurs besoins. Un approvisionnement assuré de pétrole brut est donc très important pour les États Unis. Soixante pour-cent des réserves pétrolières mondiales se trouvent au Moyen Orient; 25% en Arabie Saoudite, 10% en Irak, 10% au Koweït, 5% en Iran et encore 10% dans les autres pays de la région. Les réserves pétrolières de l'Irak sont plus du double de celles des ÉU. Comment les média américains peuvent-ils donc prétendre informer leur public objectivement et complètement sur les relations entre les ÉU et l'Iraq sans jamais mentionner le facteur pétrole?

Les média américains ne tarissent pas de broder sur la menace que représente les intentions de Saddam Hussein mais ils ne disent rien du tordage de bras et des dures négociations qui ont lieu dans les coulisses pour convaincre les autres grands pays à appuyer ou au moins à ne pas s’opposer à l'agression Américaine en Irak.

Personnellement, je ne croit pas que l'Irak puisse présenter une menace crédible pour les États-Unis. À mon avis, la peur d'un Saddam Hussein satanisé n'est qu'un outil dont on se sert pour manipuler l'opinion publique américaine de façon à lui faire consentir à une guerre qui n'est souhaitée que par le Président Bush et les magnats corporatifs d'extrême droite auxquels il appartient. Je soupçonne que le véritable enjeu, c'est le contrôle des réserves pétrolières du Moyen Orient. Une chose est certaine, les motifs véritables ne sont pas sur la table et nous sommes tous en train d'être manipulés par une bande de menteurs éhontés qui n'ont aucun respect pour personne ni pour rien, même pas pour leur propre parole.

Que vont faire Bush et ses sbires après avoir pris le contrôle des trois grands (Arabie Saoudite, Irak & Iran)? Quel rôle le couple Sharon - Bush réserve-il à Israël dans tout ça? Israël va-t-elle s'octroyer la Jordanie et la Syrie si l'Amérique s'empare des trois grands? Quel prix les Britanniques vont-ils exiger pour leur féroce appui à la guerre? Et enfin, qu'est-ce que les Russes vont retirer de ce Nouvel Ordre Mondial Israelo-Américain? Vont-ils s'accaparer de nouveau de la Géorgie, de l'Arménie et de l'Azerbaïdjan? Qu'en est-il de leur rêve séculaire d'un port en eau chaude?

(Août 2002)

Ne manquez pas le prochain épisode, la lutte pour le pétrole!
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