Notes sur les Balkans 1999
Notes historiques
L'origine ethnique
Lorsque les Romains ont conquis la péninsule balkanique,
elle était habitée par les Illyriens à l'ouest, par
les Thraces de culture semblable au sud-est entre le Danube et la mer Egée,
et par les Daces au nord du Danube et à l'est jusqu'à la
Mer Noire. Les Daces, qui étaient nombreux, ont assimilé
la culture Romaine et sont devenus les ancêtres du peuple Roumain.
Quand l'Empire Romain a été divisé en 395, les territoires
des Balkans à l'ouest du Fleuve Drina (Slovénie, Croatie
et Bosnie-Herzégovine actuelles), sont restés avec l'Empire
Romain d'Occident, alors que ceux de l'est (Serbie, Kosovo, Macédoine
et Bulgarie actuelles), sont allés à l'Empire Romain d'Occident,
plus tard connu sous le nom de Byzance. Des tribus païennes visigothes,
huniques et lombardes sont arrivées dans la région après
la chute de Rome mais elles ont été assimilées au
7ième siècle par des tribus slaves, également païennes,
émigrant vers le sud à partir de leurs territoires d'origine
au nord des monts Carpates. Certains des Thraces assimilées par
les tribus slaves sont devenus les Serbes d'aujourd'hui. D'autres, qui
avaient été conquises par des tribus turques avant l'émigration
massive slave, ont donné naissance aux Bulgares et aux Macédoniens
d'aujourd'hui. A l'Ouest, les Illyriens ont aussi été envahis
par des tribus slaves. La plupart ont été assimilés
par les ancêtres des actuels Slovènes, Croates et Bosniaques,
mais certains ont émigré vers le sud où ils ont résisté
à l'assimilation et sont devenus les ancêtres du peuple Albanien.
À l'exception les Albaniens (dont l'origine génétique
est essentiellement Illyrienne), on peut donc dire que les Slovènes,
les Croates, les Bosniaques, les Serbes, les Monténégrins,
et les Macédoniens partagent tous la même origine ethnique
principale qui remonte à la migration des Slaves du sud au 7ième
siècle. Le nom Yougoslavie signifiant "Terre des Slaves du
Sud" se réfère à ce fait fondamental.
La langue
Les Serbes, les Monténégrins, les Bosniaques
et les Croates partagent la même langue mais les Serbes et les Monténégrins
l'écrivent avec l'alphabet Cyrillique et les Croates utilisent les
caractères Latins. Elle était appelée Serbo-Croate
jusqu'à la dislocation de la Fédération Yougoslave
mais les Serbes l'appellent maintenant Serbe, les Croates l'appellent Croate
et les Bosniaques l'appellent Bosniaque. Les langues Slovène et
Macédonienne sont des variantes subtiles du Slavon, langue que parlaient
tous les Slaves du Sud. Elles sont plus proches du Serbo-Croate que l'Espagnol
l'est du Français et un peu plus différentes que l'Américain
l'est de l'Anglais.
Les distinctions religieuses
Au 9ième siècle, les Slaves sous le contrôle
de Byzance (les ancêtres des Serbes, des Macédoniens, des
Bulgares et de Russes d'aujourd'hui), ont été convertis à
l'Eglise Orthodoxe avec les Grecs et les Roumains, alors que le Slaves
vivant à l'ouest du Drina (les ancêtres des Slovènes,
des Croates et des Bosniaques d'aujourd'hui), ont accepté la version
Romaine du Christianisme comme l'ont fait, au siècle suivant, les
tribus magyares (les Hongrois) et les Slaves de l'ouest, plus au nord (les
Slovaques et les Polonais).
L'occupation turque et l'Islam
Vers la fin du 12ième siècle, le souverain
Serbe, Stefan Nemanja, a annexé le Kosovo. En 1389 une armée
d'invasion Ottomane a infligé de lourdes pertes à l'armée
Serbe dans la Bataille du Kosovo, entraînant la conquête de
la Serbie par l'Empire Musulman Ottoman en 1459, et de l'Albanie et la
Bosnie peu de temps après. La plupart des Albaniens et des Bosniaques
ont abandonné la religion Catholique pour adopter l'Islam pendant
l'occupation Ottomane qui a duré jusqu'en 1912, mais la plupart
des Serbes se sont accrochés à leur religion Orthodoxe jusqu'au
départ des Ottomans en 1878. C'est pendant cette période
que les Serbes ont traversé le Drina pour établir des communautés
Orthodoxes dans l'actuelle Bosnie-Herzégovine.Ces quatre siècles
difficiles siècles ont laissé aux Serbes une complexe de
persécution collective qui a été renforcé par
les mauvais traitements que les Nazis et le gouvernement croate fasciste
leur ont fait subir pendant la seconde guerre mondiale.
L'Albanie et le Kosovo
En 1878 les Albaniens ont formé la Ligue de Prizren
pour résister au joug des Ottomans, mais c'est seulement en 1912
que la résistance anti-Ottomane a pris de l'ampleur au Kosovo et
a réussi à expulser les Ottomans. Le Kosovo a été
inclus dans l'état nouvellement indépendant de l'Albanie
en 1912, mais l'année suivante les Grandes Puissances (Autriche-Hongrie,
France, Allemagne, Grande Bretagne, Italie, et Russie) ont forcé
l'Albanie à céder la région à la Serbie.
"Le nettoyage ethnique"
Le déplacement forcé des populations civiles
vaincues n'est pas nouveau dans l'histoire de l'humanité. Il a souvent
été pratiqué par les barbares pour occuper la terre
pour leur propre usage. Il a aussi été pratiqué par
les soi-disant pouvoirs civilisés dans les mêmes buts, par
exemple la déportation, par les Anglais, du peuple Acadien francophone
de ce qui est maintenant la Nouvelle Écosse et le Nouveau Brunswick
au Canada.
Ce qui est nouveau dans ce cas, c'est le terme "nettoyage
ethnique" qui a été donné à cette odieuse
pratique, comme si les éléments enlevés étaient
des contaminants dont l'élimination était justifiée
par un état "plus propre" de la terre après la
purge. Le terme "nettoyage ethnique" est un exemple intéressant
de la façon qu'un langage imaginatif peut-être utilisé
pour manipuler l'opinion contre les droits des minorités.
Guerres de religion?
En fait, ce dont nous avons été témoin
en Bosnie ne devrait être appelé "nettoyage ethnique"
parce que les Serbes, les Croates et les Bosniaques parlent tous la langue
et partagent tous la même origine ethnique. Les trois groupes sont
de la même "race" et ont le même bagage génétique.
Ils sont des cousins qui ont adopté des religions différentes.
Ce qui a fait de certains d'entre eux des candidats à l'élimination
par leurs cousins Slaves c'est leur religion et non pas leurs ancêtres. Ce qui est arrivé en Bosnie devrait s'appeler "nettoyage
religieux". Les atrocités commises par les Serbes ont été
tolérées sinon excusées par les autorités religieuses
Orthodoxes qui n'ont pas critiqué Milosevic avant l'été
1999, lorsqu'elles ont dû s'en dissocier car il était devenu
évident qu'il était un perdant. Le Pape non plus ne s'est
pas prononcé contre le "nettoyage religieux" pratiqué
par les Croates Catholiques plus tôt en 1993...
Bien que les Albaniens soient différents des Serbes
sur le plan ethnique, il semble que c'est leur foi Musulmane plutôt
que leur langue ou leurs ancêtres qui fait d'eux des candidats à
l'élimination, comme c'était le cas des Musulmans Bosniaques
et des Croates Catholiques. L'argument selon lequel la Serbie ne peut-être
privée des églises et monastères orthodoxes sacrés
situés dans le nord du Kosovo rappelle à l'esprit ceux qui
ont lancé les croisades médiévales pour sauver les
Terres Saintes!
Finalement, il est difficile de prétendre que la
récente guerre civile des Balkans n'était pas basée
sur des préjugés religieux quand on tient compte des alliances
qui soutenaient les parties en guerre. Les Croates et les Bosniaques ont
des liens ethniques aussi étroits avec les Russes que les Serbes,
mais c'est l'intérêt des Serbes Orthodoxes que la Russie Orthodoxe
a choisi de défendre contre leurs cousins Croates et Bosniaques.
Parallèlement, les Grecs n'ont pas de liens ethiques avec les Serbes,
et en fait ils ont été ennemis plus souvent qu'amis, mais
ils sont Orthodoxes et ont refusé de coopérer avec l'OTAN
bien qu'étant membre de cette organisation. Voyez aussi la rapidité
avec laquelle la Communauté Européenne, en partie Catholique,
a reconnu la Slovénie et la Croatie Catholique, et la générosité
de l'Iran qui a fourni aux Musulmans Bosniaques les armes dont ils avaient
besoin pour survivre!
"Des querelles ethniques" bah! Ce sont des
guerres d'intolérance religieuse, exactement comme celle de l'Irlande
du Nord!
Slobodan Miloševic
Slobodan Miloševic est né en 1941 en Serbie de
parents Monténégrins et a rejoint le Parti Communiste de
Yougoslavie quand il avait 18 ans. Il a eu un diplôme de droit de
l'Université de Belgrade en 1964 et a commencé une carrière
dans l'administration des affaires, devenant finalement le patron de la
compagnie étatique du gaz et le président d'une grande banque
de Belgrade.
Miloševic est entré à plein temps en politique
en 1984 et s'est élevé à la tête de l'organisation
locale du Parti Communiste à Belgrade cette année-là.
Miloševic a introduit un style politique populiste s'adressant directement
au peuple Serbe, par dessus les têtes des officiels du parti. Il
s'est fait un capital politique en étant le défenseur de
la minorité Serbe Orthodoxe du Kosovo contre les 90% de la majorité
musulmane albaniènne et est devenu le chef du Parti Communiste en
1987. En 1988 il a remplacé les leaders du parti dans les provinces
du Kosovo et de Vojvodina par ses propres partisans, et en 1989 l'assemblée
Serbe l'a élu à la présidence de la république.
En 1990 Miloševic a fait voter des changements de la constitution
Serbe pour abolir l'autonomie du Kosovo. La politique centralisatrice de
Miloševic a semé la crainte de la domination Serbe dans les autres
républiques, et la résistance de la Serbie à toute
réforme politique et économique, ont accéléré
l'éclatement de la Fédération Yougoslave. En 1991,
d'abord la Slovénie et la Croatie, et ensuite la Macédoine,
ont déclaré leur indépendance. En 1992 les Croates
et les Musulmans de Bosnie-Herzégovine ont aussi voté pour
la sécession.
En réponse, Miloševic a ordonné à
l'Armée Fédérale Yougoslave d'assister les milices
Serbes qui se battaient pour unir leurs parties de la Bosnie et de la Croatie
avec la Serbie afin de créer une "Grande Serbie". Cependant,
après trois ans de pleine guerre civile en Bosnie-Herzégovine,
les milices Serbes n'ont pas pu écraser les forces musulmanes, et
en 1995 l'armée Croate a chassé la plupart des Serbes de
leurs enclaves historiques en Croatie. Pendant ce temps la faible économie
de la Serbie souffrait sévèrement des sanctions commerciales
qui avaient été imposées à la Yougoslavie par
les Nations Unies en 1992. Pour faire lever les sanctions, Miloševic a
dû retirer son appui actif aux Serbes Bosniaques et signer en leur
nom l'accord de paix de Dayton en novembre 1995, mettant ainsi fin à
la guerre civile en Bosnie-Herzégovine.
En tant que président de la Serbie, Miloševic continuait
de dominer la République Fédérale de Yougoslavie,
instaurée en 1992, qui ne comprenait que la Serbie et le Monténégro.
Il maintenait son pouvoir par la répression des opposants politiques
et le contrôle des médias. Quand la constitution de la Serbie
l'a empêché de briguer un troisième mandat à
la présidence de la Serbie, il s'est fait élire président
de la Yougoslavie en juin 1997.
En février 1998 Milosevic a ordonné aux
forces militaires Yougoslaves du Kosovo de se joindre à la police
Serbe pour réprimer les agitations montantes dans la population
Albaniènne de la région. La répression a été
violente, la torture et les enlèvements étaient courants
et des centaines de personnes ont été tuées pendant
que des milliers ont dû s'enfuir pour l'Albanie et la Macédoine.
En dépit de la critique internationale, Miloševic a refusé
de retirer ses troupes jusqu'à ce que les frappes aériennes
de l'OTAN le forcent à le faire en juin 1999.
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